En quoi consiste le marketing polysensoriel ?
Posté le 12 Avr. 2013
Quand les marques sortent le grand jeu, des animations polysensorielles peuvent s’ajouter aux outils classiques de théâtralisation du point de vente (merchandising, corners, etc.).
Chères mais qualitatives, elles génèrent de l’émotion, et créent du lien. Clapotis de l’eau qui coule, rugissements des lions dans la savane, parterres de pelouse, odeurs sucrées de l’enfance, dégustations fines … l’éveil des sens enchante autant qu’il fait vendre.
Cette approche qui considère le client comme une cible polysensorielle a d’ailleurs donné naissance au concept de Merchanfeeling. Une étude de l’agence Grey à New York (sur 25000 personnes) démontre que la part émotionnelle représente 60 % de la décision d’achat.
L’atmosphère visuelle
La vue est à priori l’un de nos sens les plus captifs, car 80% des stimuli que nous percevons sont, parait-il, visuels.
Entrez chez ABERCROMBIE & FITCH, l’atmosphère tamisée -c’est un faible mot, car on ne voit rien dans ces boutiques !- combinée à une musique techno assez forte vous désinhibe et vous donne envie de danser, comme si vous étiez en boîte de nuit. A l’inverse, si vous entrez chez APPLE, la dominante de blanc, le jeu des transparences, et la lumière du jour qui entre partout contribuent à un état d’esprit positif, éveillé, en alerte. Des murs de vidéos verticaux peuvent également contribuer à cet état d’alerte. L’œil est attiré par le mouvement, et le mouvement stimule l’action. Chez CHANEL, chez DIOR, et dans toutes les boutiques haute couture, les coulisses des défilés vous sont offertes en permanence. Le rêve est là, à portée de main, et l’on n’a qu’une seule envie : se l’offrir, se l’approprier, l’emporter avec soi.
L’ambiance sonore
En 1973 déjà, Philip KOTLER avançait que la création d’un environnement d’achat produisant des effets émotionnels spécifiques, comme le plaisir ou l’excitation, est susceptible d’augmenter la probabilité d’achat.
Or la musique est typiquement le type d’outil capable de générer toute une palette d’émotions : de l’excitation avec de la musique techno, du bien-être avec de la musique classique, de la nostalgie avec du disco, etc.
A l’inverse, l’absence de musique en magasin a à priori une influence négative sur le comportement des clients. Ils y restent moins longtemps, sont de moins bonne humeur, et n’ont pas envie de demander conseil au personnel.
Certaines enseignes jouent à fond la carte musicale en allant jusqu’à créer leurs propres programmations. C’est par exemple le cas de ZADIGUE & VOLTAIRE, de SEPHORA, ou encore d’HABITAT, etc. Les programmations de certains bars ou restaurants sont d’ailleurs devenues culte (Hôtel COSTES, BUDDHA BAR, etc.).
La stimulation olfactive
De nombreuses études démontrent que le marketing olfactif est susceptible d’augmenter le temps de présence des clients en magasins parce qu’ils s’y sentent bien, et donc, de déclencher l’achat.
Il y a bien sûr les odeurs directement liées à l’activité du commerçant : les boulangeries, croissanteries, et rayons pâtisserie des grandes surfaces, dégagent naturellement une bonne odeur de pain chaud, et bien évidemment, ça marche. De même pour SEPHORA, qui sent bon le parfum, et qui invite naturellement à l’essai produits grâce à de multiples testeurs. Et de la même façon, même s’il s’agit de parfums superficiels, les magasins de chaussures qui optent pour la diffusion d’odeur de cuir, par exemple, réveillent l’odorat des clients et influent positivement sur une perception de qualité.
Mais certaines enseignes décident parfois de créer leurs propres signatures olfactives, conscientes de la force du parfum pour créer un lien émotionnel. Sans compter qu’un endroit qui sent bon est un endroit où l’on a naturellement envie de s’attarder. Voici typiquement comment une boutique de lingerie fine à Nice, LUNE DE MIEL, a réussi à faire rester les clientes plus longtemps dans son magasin, et à acheter volontiers : en testant le diffuseur d’odeurs de la société Nea-Diffusion, parfum Bouquet de roses.
Sans y croire vraiment au début, et pourtant, c’est une réalité : depuis,la clientèle s’attarde pour essayer de nombreux sous-vêtements jusqu’à, en général, en trouver qui lui vont à ravir. Pour LA POSTE, même résultat. En testant la diffusion d’un léger parfum, les retours sont là : les clients ont l’impression d’attendre moins longtemps.
L’éveil des papilles
Bien sûr, qui ne s’est pas laissé tenter par la dégustation en rayons de bons produits du terroir ? Les petits producteurs multiplient les dégustations en grande surface pour se faire connaître, et celles-ci sont souvent très appréciées.
Mais le marketing gustatif s’invite surtout là où on ne l’attend pas. Se voir offrir une coupe de champagne dans un magasin de vêtements haut de gamme lors de soldes privées, ou déguster des amuse gueule raffinés dans une galerie d’art lors d’un vernissage, voici ce qui fait parfois toute la différence.
Quand certaines enseignes mélangent le tout, les résultats ne se font pas attendre. Le trafic en magasin augmente, et le temps passé à l’intérieur aussi. Au final, ce sont des ventes en plus, et un impact très positif sur l’image de l’enseigne.
Si l’on prend l’exemple de l’opérateur SFR, pour qui «l’expérience in store » est devenue un véritable axe stratégique, la stimulation des sens est un succès dans leurs flagship stores (PDV Champs-Elysées). Ecrans plasma sur lesquels défilent les offres commerciales, manipulations des produits, programmations musicales très variées, fragrances diffusées en microparticules qui changent tous les trois mois, et même parfois aménagement de bars ou de restaurants (l’ex STUDIO SFR de la rue Tronchet), pour stimuler les papilles des clients.
En définitive, rien n’est assez beau, rien n’est assez fou pour créer – et récréer, au sens récréatif du terme – du lien avec un consommateur de plus en plus infidèle.
Et à l’heure où certaines enseignes que l’on croyait éternelles se trouvent en difficulté (concurrence féroce du E-commerce oblige), on ne peut s’empêcher de penser que le marketing polysensoriel n’est pas du luxe !